Erik Satie, Vexations

performed by Stephane Ginsburgh sr294

https://subrosalabel.bandcamp.com/album/42-vexations-1893-performed-by-stephane-ginsburgh

Musique d’ameublement,
literally, “furniture music,” the phrase coined by Satie in 1917, where he identifies sound as drapes, tiling, wallpaper – items belonging to the environment and changing it simply by being in it, by actually becoming elements of the space. The idea being that, since you don’t notice the sound right away, it becomes, in a sense, part of the furniture.

Pieces like Tapestry in Forged Iron – “For the arrival of the guests (grand reception), to be played in a vestibule” and Phonic Tiling – “Can be played during a lunch or civil marriage” (both composed in 1917) are typical examples of this classification. Does Vexations belong to it too? Strictly speaking, no. However, like with the furniture music pieces, the score is minimal and to be repeated. Though they do not tread exactly the same grounds, these pieces seem to be related, at least conceptually if not formally.

A few years ago, Stephane Ginsburgh and I decided to create a series devoted to chance music, and not only chance music but music showcasing concepts on the fence between music and game of chance. That is how we ended up drawing 88 numbers from a bowl to recreate Duchamp’s perpetually-changing Erratum musical. From the same numbers, we repeated the operation seven times, creating as many variations in tempo. At the time, the emotion and astonishment brought forth by such an exercise had struck us deeply. The experience has been accounted in Variations sur un seul tirage (c’eut pu être autrement). (1)

This recording, the second installment in that series, also involves a peculiar physical device since it calls for 840 repetitions of a single motif. Satie jotted down the idea in 1893. A concept – surely; a joke – obviously; something feasible – yes, for it has been done in 1963, on John Cage’s impetus. John Cale was one of the musicians involved (2): « Between 9 and 10 September 1963 I was one of a relay team of pianists, under the direction of John Cage, who played Vexations by Eric Satie at Pocket Theatre, 100 Third Avenue near 13th Street, in 18 hours and 40 minutes. The 180 notes of this 80-second work were played 840 times. The whole thing was John Cage’s idea. The admission was $5, but members of the audience got a refund of five cents per twenty minutes, and those who stayed to the bitter end got a 20 cent bonus. (3)
So, in Vexations, Satie will be evocated through Cage. Had Satie envisioned playing the piece? Who knows. Neither do we know if Duchamp’s Erratum musical was meant to be executed. What can be said, however, is that when played in its entirety, Vexations inevitably becomes a performance for both players and listeners. An experience in repetition – repetition without the slightest variation, except for the unavoidable tempo shifts that occur over such a lengthy performance, alterations in how the piano keys are hit, in other words everything that falls within the realm of the mechanically involuntary. What would you say about a ritornello that would last between 18 and 24 hours?

Approach the piece played by Stephane as a fragment left untouched from a part of that performance, as if the pianist was relaying another pianist and playing until a new pianist would take his place. To hear the piece as it was originally designed, simply play the CD on repeat mode twelve times.

Mantra, mystical trance, pre-Dada action, overly stretched intimate piece, perpetuum mobile, parody – nothing can be ruled out. Satie never explained the meaning of this particular piece, but he did write the following above the three-line score: In order to play this motif 840 times consecutively to oneself, it will be useful to prepare oneself beforehand, and in utter silence, by grave immobilities.


February 20

(1) Erratum Musical, Marcel Duchamp, Sub Rosa sr183.
(2) Besides Cale and Cage, the performers were David Tudor, Christian Wolff, Philip Corner, Viola Farber, Robert Wood, MacRae Cook, David Del Tredici, James Tenney, and Howard Klein.
(3) John Cale and Victor Bockris, What’s Welsh for Zen: The Autobiography of John Cale (NY/London: Bloomsbury Publishing, 1999)

« Between 9 and 10 September 1963 I was one of a relay team of pianists, under the direction of John Cage, who played Vexations by Eric Satie at Pocket Theatre, 100 Third Avenue near 13th Street, in 18 hours and 40 minutes. The 180 notes of this 80-second work were played 840 times. The whole thing was John Cage’s idea. The admission was $5, but members of the audience got a refund of five cents per twenty minutes, and those who stayed to the bitter end got a 20 cent bonus. »

Musique d’ameublement,
le terme a été imaginé par Satie en 1917, il y désigne le son en tant que tenture, carrelage, tapisserie – objets faisant partie de l’environnenemnt, qui le changent par leur présence et qui en est, en réalité, un des éléments du lieu. L’idée étant qu’en ne le remarquant pas dès l’abord – il fait, en quelque sorte, partie des meubles.
Des pièces comme Tapisserie en fer forgé – « pour l’arrivée des invités (grande réception), à jouer dans un vestibule » ou Carrelage phonique – « peut se jouer à un lunch ou à un contrat de mariage » (tout deux conçues en 1917) sont typiques de cette nomenclature. Vexations en fait-elle partie ? Pas au sens strict sinon que comme les musiques d’ameublement, la partition est minimale et à répéter. Sans se recouper tout à fait, il semble que ces pièces se rapprochent, si non d’un point de vue strictement formel, du moins conceptuellemment.

Il y a quelques années, nous avions, Stephane Ginsburgh et moi, été traversés par l’idée de créer une série sur la musique aléatoire – et pas seulement aléatoire mais faisant la part belle à des concepts à la lisière de la musique et du jeu de hasard. C’est ainsi que nous pêchions 88 numéros dans une vasque pour recréer le perpétuellement changeant erratum musical de Duchamp, nous avions, à partir des mêmes numéros, répétés l’opération sept fois – ce qui constituait autant de variations (de tempo). Nous avions, à l’époque, ressentis profondément ce que créait (émotion, étonnement…) un tel exercice. L’expérience est décrite en détail dans Variations sur un seul tirage (c’eut pu être autrement). (1)

Cet enregistrement, deuxième de la série, implique lui-aussi, un dispositif physique particulier puisqu’il s’agit de répéter 840 fois le même motif. Idée notée en 1893 par Satie, concept – incontestable, blague – évidemment, faisable – oui puisque réalisé en 1963 à l’initiative de John Cage. John Cale était l’un des musiciens (2) : “Entre le 9 et le 10 septembre 1963, j’étais un des pianistes qui se relayaient sous la direction de John Cage pour jouer Vexations d’Erik Satie au Pocket Theatre, 100 Troisième Avenue, près de la 13ème Rue, en 18 heures 40 minutes. Les 180 notes, durant 80 secondes, furent jouées 840 fois. L’idée en revenait à John Cage. L’entrée était de 5 $ mais les membres de l’audience étaient remboursé de 5 cents par tranche de 20 minutes et ceux qui restaient jusqu’à la toute fin, recevaient eux 20 cents de plus.”(3)
Dans le cas de Vexations, l’évocation de Satie se fera donc à travers Cage. Satie a-t-il imaginé la jouer ? On l’ignore. Comme on ignore si l’ Erratum musical de Duchamp devait être exécuté. Ce que l’on peut dire, par contre, c’est que Vexations joué dans sa totalité devient inévitablement une performance pour les exécutants et les écoutants. Une expérience sur la répétition – une répétition sans la moindre variation, excepté les changements inévitables de tempo au cours d’une période très longue de jeu, des éventuelles différences dans la frappe des touches, tout ce qui est mécaniquement involontaire. Que dire d’une ritournelle qui durerait de 18 à 24 heures ?

Il faut s’imaginer la pièce jouée par Stephane comme le fragment sans retouche d’une part de cette éxécution, comme si le pianiste en relayait un autre avant de céder sa place à son tour. Répéter 12 fois le cd équivaudrait à la pièce telle qu’elle fut conçue.

Mantra, transe mystique, acte pre-dada, pièce intime exagérément étirée, perpetuum mobile, parodie – rien ne peut s’exclure. Satie, qui ne s’expliqua jamais sur le sens de cette pièce écrivait laconiquement en haut des trois lignes qui constituent la partition : Pour se jouer 840 fois de suite ce motif, il sera bon de se préparer au préalable, et dans le plus grand silence, par des immobilités sérieuses.
Février 2009

(1) Erratum Musical, Marcel Duchamp, Sub Rosa sr183.
(2) les autres étant, outre Cale et Cage, David Tudor, Christian Wolff, Philip Corner, Viola Farber, Robert Wood, MacRae Cook, David Del Tredici, James Tenney et Howard Klein.
(2) John Cale and Victor Bockris, What’s Welsh for Zen: The Autobiography of John Cale (NY/London: Bloomsbury Publishing, 1999)